03/ L’indépendance de la Belgique et le règne de Léopold Ier (1830-1865)

L’établissement de l’indépendance et du  régime

Au niveau interne {Mabille (X), Histoire politique de la Belgique, éd. CRISP, 2000, p.105-108}

Le Gouvernement provisoire déclare l’indépendance, le 4 octobre 1830 et le 3 novembre de la même année, 46.099 électeurs (seuls les hommes payant un certain niveau d’impôts ou disposant d’un diplôme ou exerçant des fonctions spécifiques vont pouvoir prendre part au vote) {38.429 électeurs censitaires (c’est à dire ayant le droit de voter du fait de l’importance des impôts payés) et 7.670 électeurs capacitaires (c’est à dire ayant le droit de voter du fait de fonctions exercées ou de diplômes (magistrats, avocats, notaires, officiers, universitaires, ministres des cultes)} élisent le Congrès national (Parlement).

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Le 22 novembre 1830, le Congrès national décide (par 174 voix contre 13) que la Belgique sera une monarchie constitutionnelle et représentative sous un chef héréditaire.

Pourtant, de nombreux membres du Congrès étaient d’opinion républicaine. Mais, il était inconcevable dans l’hypothèse où les grandes puissances (Angleterre, Autriche, Prusse, France, Russie) réunies en conférence à Londres (voir ci-dessous) acceptent l’indépendance de la Belgique, qu’elles admettent, en outre, l’avènement d’une république. Aussi, seuls les républicains les plus convaincus du Congrès national votèrent-ils contre la forme monarchique de l’État.

Il ne faut, en effet, pas oublier que des monarchies absolues comme la Prusse, la Russie et l’Autriche ne pouvaient que réprouver l’évolution qui se marquait en Belgique, qu’il s’agisse de la revendication de l’indépendance ou de la volonté d’instaurer un régime de libertés constitutionnelles.

Le Congrès national va approuver, le 7 février 1831, une Constitution très progressiste pour l’époque.

Le choix du chef de l’Etat ne va pas être aisé, l’accord des grandes puissances étant nécessaire {Le candidat élu, le duc de Nemours, fils du Roi de France, Louis-Philippe, déclina l’offre du trône pour calmer les velléités du Royaume-Uni}. Finalement, le choix va se porter sur un prince allemand, Léopold de Saxe-Cobourg-Gotha {qui avait refusé en 1830 la couronne de Grèce, pays qu’il jugeait trop instable et trop éloigné du centre de l’Europe}, veuf de la fille du Roi d’Angleterre. Il va être élu roi des Belges par le Congrès national le 4 juin 1831 et va prêter serment le 21 juillet 1831 (raison pour laquelle le 21 juillet est devenu le jour de la fête nationale).

Idée de visite: Le Palais de la Nation {Pour le visiter: Service des Relations publiques et internationales –icon phone 32 (0)2/549 81 36icon fax 32 (0)2/549 83 02 – icon website lachambre.be}

Palais de la Nation a Bruxelles

Le Palais de la Nation (siège du Parlement fédéral belge), la Colonne du Congrès et le musée Bellevue à Bruxelles , édifié en 1779, dans un style néo-classique, peut être visité en groupe. Le circuit de visite parcourt les salles les plus remarquables de l’édifice (dont la Chambre et le Sénat) et permet de mieux percevoir quelles sont les missions du parlement et comment se déroulent ses activités.

 

Idée de visite: La Colonne du Congrès

la colonne du congres

Située à deux pas du parlement, sur la rue Royale, la Colonne du Congrès commémore le Congrès national de 1830 qui rédigea la Constitution belge. Elle est surmontée d’une statue de 4 mètres 70 de haut, représentant le premier roi des Belges, Léopold Ier. Sur le socle, sont gravés les grandes dates de l’indépendance, les noms des membres du Congrès et ceux des membres du Gouvernement provisoire constitué après la Révolution belge, ainsi que les grands principes de la Constitution. Quatre hautes figures féminines, œuvres de différents sculpteurs, symbolisent les Libertés fondamentales garanties par la Constitution: la Liberté des cultes, la Liberté d’association, la Liberté de l’enseignement et la Liberté de la Presse {Elle abrite, par ailleurs, depuis le 11 novembre 1922, la tombe du “soldat inconnu”, hommage aux victimes des combats de la Première Guerre mondiale}.

 

Idée de visite: Le musée Bellevue {icon map-maker Place des Palais, 7 – 1000 Bruxelles –icon phone 32 (0)70/22 04 92icon website belvue.be – collection permanente}

musee belvue

Le musée Bellevue permet de découvrir les événements marquants de l’histoire de la Belgique au fil de ses 9 salles. Chaque salle représente une époque: le visiteur est plongé dans l’ambiance grâce à la musique, aux documents historiques, extraits de films et objets présentés. Il découvre aussi en parallèle l’histoire des souverains belges, présentés dans les couloirs reliant les salles.

 

Idée de film: “Moi Belgique”

“Moi Belgique” {Disponible sur Fnac} est une série de documentaires, réunis dans un coffret, qui présentent l’histoire de la Belgique au fil du temps.

 

Au niveau international

Une conférence diplomatique sur l’avenir de la Belgique va s’ouvrir à Londres le 4 novembre 1830. Les grandes puissances reconnaissent la séparation de la Belgique et des Pays-Bas mais lui imposent la neutralité.

Le traité des XXIV articles (1831) va enlever à la Belgique la moitié du Limbourg et la partie germanophone du Luxembourg (qui deviendra ultérieurement indépendant).

Le règne de Léopold Ier (1831-1865)

leopold Ier

Relations internationales

A peine arrivé sur le trône, le roi Léopold Ier va devoir faire face aux Pays-Bas désireux de mettre fin à l’indépendance de la Belgique (“Campagne des dix jours” {Elle dura du 2 au 12 août 1831.}). Grâce à l’aide française, l’avance hollandaise va être arrêtée. Pour défendre son nouveau titre royal, et en signe de gratitude à l’égard de la France, il va épouser en 1832 Louise-Marie d’Orléans, fille du roi de France Louis-Philippe.

Ce n’est qu’en 1839 que l’indépendance belge sera définitivement garantie grâce à la ratification par les Pays-Bas du traité des XXIV articles établissant l’indépendance du nouveau royaume belge, tant face aux Pays-Bas que face à la France.

De façon générale, Léopold Ier va se servir de ses relations familiales pour protéger le jeune royaume de Belgique face aux ambitions prussiennes et françaises (notamment face aux menaces d’annexion sous le règne de Napoléon III).

Afin d’assurer l’approvisionnement en matières premières et de garantir par conséquent l’indépendance économique, Léopold Ier finance diverses expéditions coloniales.

Vie politique

Jusqu’en 1846, catholiques et libéraux (les 2 seules tendances existant à l’époque) vont gouverner ensemble (on parle de Belgique unioniste). Ils doivent faire face aux problèmes vitaux qui se posent au jeune État dont la consolidation de son indépendance et son organisation.

Cette union va ensuite disparaître avec la formation d’un système de partis appelé à devenir le moteur de la vie politique. Le clivage philosophique et religieux va se cristalliser, les partis politiques allant se situer d’abord sur un axe clérical/anticlérical. L’opposition des libéraux (soucieux de la prééminence du pouvoir civil et désireux de limiter -voir soustraire- l’influence de l’Église dans des domaines comme l’assistance et l’enseignement) et des catholiques sur toutes les questions qui mettent en cause les relations de l’Église et de l’État {Un des épisodes les plus aigus de cette opposition va être ce qu’on a appelé la “guerre des cimetières”. Les enterrements civils étaient licites mais se heurtaient dans la pratique à d’énormes difficultés. Des organisations vont donc se constituer afin d’organiser les enterrements civils de leurs membres. Mabille (X), Histoire politique de la Belgique, éd CRISP, 2000, p.150} va dominer la vie politique jusqu’en 1884.

Le droit de vote est réservé aux Belges de sexe masculin âgés de 25 ans au moins et qui paient un certain montant d’impôts (suffrage censitaire) {Ceci représente une restriction par rapport au régime qui avait été en vigueur pour l’élection du Congrès national et qui incluait des électeurs capacitaires (hommes disposant d’un diplôme ou exerçant des fonctions spécifiques), à côté des électeurs censitaires (hommes payant un certain niveau d’impôts).}. Ces conditions font qu’en pratique, moins de 5% de la population seulement peut voter {Notons que bien que le régime électoral fasse obstacle à la représentation politique de la classe ouvrière, il autorise cependant la présentation de candidatures ouvrières, les conditions d’éligibilité à la Chambre des représentants (mais pas au Sénat) n’étant pas sélectives comme celles de l’électorat. Il va donc y avoir, pendant tout le régime censitaire des candidats et des élus qui n’étaient pas électeurs.}. Le pouvoir économique et politique est aux mains des “possédants”.

Vie économique

C’est au cours des années 1834-1835 que le véritable essor industriel de la Belgique va commencer.

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La première ligne de chemin de fer en Europe continentale est ouverte en Belgique, le 5 mai 1835. Elle relie Bruxelles à Malines.

La Belgique est la deuxième puissance industrielle au monde (après la Grande-Bretagne). L’essor industriel, soutenu par l’action des pouvoirs publics, s’accompagne d’une misère profonde des masses tant rurales qu’urbaines. Les révoltes sont sévèrement réprimées. Karl Marx (qui vivra à Bruxelles de 1845 à 1848, date de son expulsion) qualifie la Belgique de “paradis du capitalisme“. Le travailleur n’y jouit d’aucune protection juridique ou politique. La coalition d’ouvriers est interdite. La classe ouvrière ne peut ni s’exprimer ni s’organiser.

Le travail des enfants n’est pas limité par la loi. Toute législation qui ne repose pas sur le principe de liberté absolue du travail inquiète. C’est surtout dans le secteur social (conventions salariales et conditions de travail) que l’intervention régulatrice de l’État est rejetée.

Idée de visite: L’écomusée du Bois-du-Luc {Ecomusée bois du luc –icon map-maker Rue Saint-Patrice, 2b – 7110 La Louvière (Houdeng-Aimeries) –icon phone 32 (0)64/28 20 00icon website ecomuseeboisduluc.be}

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L’écomusée du Bois-du-Luc à La Louvière est situé dans les anciens bureaux de la Société des Charbonnages du Bois-du-Luc. Il permet d’appréhender l’ère industrielle, les conditions de vie des ouvriers, les luttes sociales, les relations patron/ouvrier, les métamorphoses d’un environnement rural vers un paysage industriel, les brassages culturels engendrés par la mine, etc.

Le musée n’est pas circonscrit à des salles mais comprend les ateliers, les bureaux, la fosse, la cité ouvrière, l’hospice, les terrils etc.

 

Émergence du mouvement flamand

Le seule langue officielle en Belgique, à l’époque, est le français. C’est la seule à être parlée dans l’administration, la justice, l’enseignement, l’armée. Le français est la langue de la classe supérieure et des lettrés qu’ils viennent du sud (Wallonie) ou du nord (Flandre) du pays. Le peuple, lui, s’exprime dans des dialectes.

En 1847 est publié le “Manifeste du mouvement flamand”. Il exige notamment l’enseignement du néerlandais dans toutes les écoles secondaires et supérieures sur pied d’égalité avec l’enseignement du français, l’utilisation du néerlandais dans toutes les institutions situées en région flamande, l’utilisation du néerlandais en justice lorsque l’inculpé est flamand, l’obligation, pour les fonctionnaires d’être bilingues dans les régions flamandes, … Il se conclut par “Que l’on nous accorde à nous, majorité de la nation, avec la moitié des charges et des devoirs, également la moitié des droits et avantages (…) en un mot, que l’on fasse en sorte qu’en Belgique, toutes les parties de la nation soient traitées de la même façon, et les plaintes et l’hostilité se changeront automatiquement en louanges en l’honneur de la patrie commune, dans l’amitié et la fraternité” {cité in Mabille (X), Histoire politique de la Belgique, éd CRISP, 2000, p.142-143}. Ce texte est révélateur de la précocité du mouvement flamand dans sa capacité d’expression d’un programme qui constituera longtemps la plate-forme commune de ses militants, même s’ils se divisent ou s’opposent, par ailleurs, selon leurs tendances politiques.

Les dirigeants de ce mouvement étaient issus de couches sociales flamandes non encore francisées et c’était à ces couches sociales-là qu’ils s’adressaient. Ils devinrent sensibles aux frustrations sociales qui résultaient de la barrière linguistique (par exemple, la nomination en Flandre de fonctionnaires wallons).

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